L’émotionnel découpé en rondelles

J’ai vu passer sur Twitter une référence à une infographie de Daniel Goleman sur , relayée par Eduvoice. Elle m’a intriguée, car en même temps elle m’a attirée (je suis convaincue de l’importance de compétences dites “émotionnelles” pour enseigner et former), et immédiatement agacée (j’ai le même genre d’impression quand je lis ce type de document que si je lisais un horoscope).

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Daniel Goleman est docteur en psychologie clinique et développement personnel, et journaliste au New York Times. Il a écrit des livres, sur l’intelligence émotionnelle, l’attention, le leadership, la méditation entre autres.

Sur ce blog, qui propose une synthèse claire, j’ai lu que ce que Daniel Goleman appelle l’intelligence émotionnelle se décompose en cinq catégories, représentées sur l’infographie ci-dessus. Chaque composante de décline en compétences émotionnelles “sans lesquelles une performance professionnelle hors pair est impossible”. Et chaque compétence se répartit par ailleurs en plusieurs groupes.

Je suis perplexe. Je le serais sans doute moins si je lisais les ouvrages de monsieur Goleman, cela dit : c’est facile de donner un avis sans savoir ce qu’il y a derrière. Pourtant, je ne le ferai pas. Sans doute parce que mes motivations premières et mes besoins actuels sont ailleurs, sans doute aussi parce que les titres d’ouvrages et le type de communication de Daniel Goleman me mettent à distance, car ils ne me correspondent pas.

Mais quand même, j’ai des questions.

La conscience de soi, ok, je vois.

Dans l’empathie, la “passion” du service, qu’est-ce que c’est ? Pourquoi la sensibilité politique ? Dans quel sens ?

Côté maîtrise de soi, pourquoi placer l’innovation ? En plus, je crois peu au concept d’innovation (hors nouvelles technologies). Je crois qu’on réinvente, qu’on s’approprie, qu’on déforme, qu’on améliore, qu’on réactualise, mais pas qu’on innove, bien souvent.

Dans la motivation, l’exigence de la perfection me laisse sceptique. Je crois que c’est illusoire, vaniteux et qu’au final c’est la plupart du temps un frein à l’imagination et l’audace. Et puis ce qui est humain est par nature imparfait, et j’aime ça. L’optimisme aussi me laissait songeuse : si c’est au sens de l’énergie, d’accord. Mais généraliser l’optimisme comme composante de la motivation ne me convainquait pas. Pourtant je suis assurément à ranger côté optimiste. Mais je voyais ça comme mon style personnel, pas une composante à généraliser pour réussir dans la vie. En même temps, le principe d’éducabilité, indispensable pour enseigner et former, est assurément dans l’optimisme. Donc là, je change d’avis. Hop. Je ne suis toujours pas fan du choix du terme optimisme, mais d’accord.

Dans la catégorie attitudes sociales, je déteste le mot influence. En tant que formatrice, je ne veux surtout pas exercer une influence. Je veux partager, réfléchir collectivement, échanger. Pas influencer. Et je ne comprends pas le terme de leadership en fait, mais lest possible que j’y mette une certaine mauvaise volonté.

Peut-être que ce qui m’embête, c’est cette façon de catégoriser, de découper en rondelles. Ou bien c’est la volonté annoncée initialement de chercher à atteindre des capacités professionnelles hors pair. J’essaie de m’améliorer en continu, et j’y investis beaucoup, beaucoup de temps et d’énergie. Mais ce que je veux, moi, c’est être utile. Pas être hors pair. Je veux être parmi les semblables, avec eux, pour nous tous.

Je manque sans doute de gnaque. Mais ce n’est pas grave, parce que ça va très bien comme ça. Et surtout, cette infographie n’a pas été faite, je suppose, en lien avec mes métiers. Je ne peux donc pas projeter mes problématiques comme ça, directement. En plus elle a été traduite, et il faudrait aller chercher la version originale.

Mais n’empêche, ça me chiffonne. C’est amusant, parce que c’est épidermique. Tsss.

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