Prérentrée 2022

Je la trouve spéciale, cette rentrée. Pas dans le sens youpi-tralalère, voyez-vous.

Notre métier est de plus en plus difficile, en défaut grave et avéré de reconnaissance et d’attractivité. L’ère Blanquer a été destructrice, alors qu’avant, c’était déjà compliqué. Les démissions sont légions : beaucoup de collègues sont fatigués, démesurés, dégoûtés.

Et pourtant.

Pourtant ce métier reste un métier de coeur, qui porte un projet de société, une volonté de diffuser le savoir, d’émanciper, de constituer un appui pour faire pousser des intelligences plus haut, vers la lumière. On n’enseigne pas par hasard. C’est d’autant plus révoltant de voir toutes et tous ces collègues contraints de s’en détourner alors qu’ils croient toujours en les mêmes valeurs, mais que le gouvernement ne leur a pas donné les moyens, ni témoigné le respect auxquels ils avaient droit. Il les a abandonnés.

Aujourd’hui, le ministère réagit, comme d’habitude, plus qu’il n’agit. Il gigote, en réponse aux impulsions d’urgence qu’il reçoit. C’est absurde. Nous, pendant ce temps, nous enseignons la réflexion, la suspension du temps de l’action pour analyser et anticiper.

Mais en attendant, je souhaite une belle journée à toutes celles et ceux qui sont concernés par cette rentrée : aux élèves qui rentrent demain ou après-demain, aux adultes qui les accompagnent, à tous les personnels. A celles et ceux qui enseignent, qui administrent, qui rendent fonctionnel, qui accueillent, qui gèrent, qui mitonnent, qui soignent, qui accompagnent, qui orientent, qui inspectent, qui forment… Qu’ils aient un diplôme ou un autre, ou pas du tout. Qu’ils tentent l’aventure pour la n-ième fois, ou moins, ou plus. Qu’ils fassent leur boulot par passion ou pas. Qu’ils pensent jeter l’éponge prochainement ou qu’ils espèrent que c’est pour longtemps. Je souhaite aussi une belle journée à toutes celles et ceux qui ont choisi de quitter le navire, en espérant qu’ils seront soulagés de ne pas être dans un établissement scolaire aujourd’hui, la tête pleine de projets.

Et j’attends demain avec impatience : je retrouverai pour la 28ème fois des élèves, que j’apprendrai à connaître et réciproquement, auxquels j’enseignerai cette merveilleuse discipline que sont les mathématiques. Ma classe est prête, mon cartable est prêt, mes projets pour l’année sont prêts, et si j’ai en effet perdu des illusions, que je ressens aussi l’abandon institutionnel, j’ai toujours les mêmes envies, les mêmes espoirs, le même frisson. J’ai bien de la chance.

C’est parti.

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