Dans une évaluation, j’ai posé à mes élèves cet exercice :

Nous avions travaillé, en classe, déjà évalué et remédié. Là, c’est une réévaluation. Et en classe, j’ai présenté ainsi aux élèves :

Ce que je recherche, c’est de donner du sens à la notion de vitesse, en mettant en lien deux grandeurs (la distance et la durée), en faisant explicitement apparaître la proportionnalité, en proposant des données qui permettent le calcul mental, dont je ne veux pas qu’il soit un obstacle car ce n’est pas ce que je souhaite évaluer.
J’ai expliqué et ensuite ré-expliqué aux élèves mes objectifs. Il en reste encore 4 (sur 51) qui s’accrochent pourtant à cette formule :

Aucun de ces 4 élèves n’a réussi à résoudre correctement la question. 2 d’entre eux, comme ci-dessus, ont écrit leur formule et c’est tout. 2 autres ont tenté un calcul : 150:100 ou 150:140. Dans ces deux cas, les élèves ont indiqué sur leur copie qu’ils pensaient s’être trompés. L’élève qui est parti sur 150:100 c’est juste loupé sur l’unité, en fait.
En discutant avec ces 4 élèves, j’ai observé deux cas de figure : 2 m’ont dit que leurs parents les ont aidés à travailler et n’ont pas compris ma façon de faire, et trouvent que la formule c’est plus rapide “parce qu’on n’a pas besoin de réfléchir”. 2 autres m’ont expliqué qu’en physique, on fait comme ça. Bon, c’est déjà ça, qu’ils fassent du lien entre des disciplines différentes, car parfois les élèves pensent que les notions sont différentes d’une matière à l’autre même si elles portent le même nom.
Je trouve intéressante cette résistance. Elle est relative : sur les 51 copies, 40 exposent la solution de façon correcte et argumentée, 4 font référence à LA formule, 5 ne proposent aucune réponse et 2 font référence à la proportionnalité, mais se trompent dans le sens de la proportionnalité en effectuant des opérations qui ne sont pas adaptées à la proportionnalité. Toutefois, c’est à l’issue de longs efforts de ma part, et il demeure des représentations qui recherchent l’automatisme (ce qui n’a rien d’insultant, on en a besoin) de façon incompatible avec la recherche de la compréhension du principe (incompatibilité sans fondement).
D’ailleurs, j’en veux bien, de l’application de cette formule, moi, si elle est correctement employée et articulée avec la consigne. Le truc, c’est qu’en général c’est loupé.
J’ai le même problème avec mes étudiantes et étudiants de L2 quand je leur demande de me donner la représentation en base 2 d’un entier. La plupart utilisent une formule, un algorithme dont iels ne comprennent pas le principe : on écrit, dans l’ordre inverse, les restes successifs de divisions par deux.
Je préfère qu’iels se demandent combien il y a de paquets de 128, de 64, 32, 16 etc. parce qu’en procédant comme ça, on comprends ce qu’est une représentation en base 2. Ce n’est plus une sorte de chose un peu magique.
Bonjour Claire,
Je partage totalement ton point de vue.
Les élèves (et les parents) qui sont obnubilés par les formules sans y mettre un sens derrière se trompent plus souvent que les élèves qui n’utilisent pas de formules mais écoutent leur “bon sens”.
Néanmoins, il faut bien reconnaître un côté pratique aux formules : elles généralisent des méthodes de calcul.
Par contre, en tant qu’enseignant, il faut faire très attention à ne pas les introduire avant que les élèves aient compris et utilisé les relations entre les grandeurs intervenant dans les formules. Sinon” l’épidémie” d’erreurs risque d’être difficile à combattre…