J’ai reçu une très très jolie question d’une collègue qui m’écrivait surtout comme maman :
Je suis maitre E, et je cherche souvent comment aider les élèves à aimer les maths. Mais en tant que maman je n’y suis pas parvenue. Ma fille aînée s’accroche mais ne prendra pas spécialité maths. Ma seconde fille réussit également mais sans plaisir et dans en comprendre le sens.
Comment puis les aider à aimer les maths? Comment puis-je les aider à prendre plaisir ? Comment les aider à en comprendre le sens? Comment les aider à comprendre les mathématiques?
Ces questions sont profondes, énoncées avec une simplicité qui retourne, et en même temps y apporter une réponse constructive est terriblement complexe. Leur auteure craignait que sa question fût incongrue ; alors là, pas du tout !
La réponse que je lui ai faite est sans doute frustrante : je n’ai pas de solution, en fait. Avec des petits, c’est plus facile : on peut développer un goût pour des aspects multiples de maths, en dehors de préjugés qu’ils et elles se sont forgés. Là, on a affaire à des grandes… Avant tout, je pense que l’important est, pour nos enfants dans cette situation, de ne pas avoir à lutter : si elles n’aiment pas les maths, il ne faut pas les « forcer » à choisir la spé maths. En parallèle, il faut bien affirmer le fait qu’on peut arriver aux maths à tout âge, que rien n’est figé, et poursuivre l’acquisition d’une culture mathématique. A mon avis, c’est par l’aspect culturel des maths que ces jeunes filles peuvent modifier leur regard : donner des voir des maths partout, faire des liens avec tous les autres champs disciplinaires (et y entrer en particulier par les centres d’intérêts ; comme il y a des maths partout, c’est forcément possible !), chausser des lunettes mathématiques pour regarder les arts, raconter des histoires de maths, découvrir des spectacles qui font vivre les maths… mais pas seulement. Les mathématiques sont ouvertes sur le monde, pas renfermées sur elles-mêmes. Elles peuvent être une rencontre à n’importe quel moment de la vie, mais cette rencontre dépend du contexte, du moment et des personnes qui nous y amènent. Ce qui est certain, c’est qu’on n’y arrive pas si on est en stress ou sous pression.
Les maths scolaires peuvent sembler techniques et vides de sens. Elles peuvent être subies, contraignantes, parfois blessantes. Elles peuvent aussi apparaître sous un jour totalement différent, libératrices, créatives, ludiques et réconfortantes… Mais on a le droit de ne simplement pas les aimer, et on peut ne pas percevoir de sens aux maths en étant très intelligent. Et on a la vie devant soi, pour évoluer, découvrir et comprendre.
Laissons le temps faire. Le plaisir, le bonheur à faire des maths est particulièrement intime car il est complètement intellectuel. On peut favoriser les rencontres, mais après, c’est l’affaire de chacun et de chacune ! Sans doute échanger avec des personnes qui aiment et vivent les maths peut aider à évoluer : un premier pas crucial est de reconnaître qu’on peut s’épanouir dans les maths, qu’elles peuvent être pour certains, certaines, un réel plaisir. Ca pourrait donner envie, non ?
