Les nombres relatifs en ULIS

Cette semaine, j’ai fait travailler trois de mes élèves sur les nombres relatifs. Au départ, mon objectif était de leur faire découvrir les nombres relatifs vraiment en tant que nombres, et de répondre à la demande de l’un d’eux, qui voudrait faire des maths “comme les copains y font”. Je ne savais pas trop ce que cela allait donner, mais puisqu’ils en avaient envie, pourquoi pas ?

Nous avons commencé par des opérations à trou, d’abord du type 5 + … = 8, puis du type 6 + … = 6, pour arriver à des questions comme 7 + … = 3. Les élèves n’ont pas été perturbés pour un sou. Ils ont marqué un moment d’étonnement devant le cas du zéro, ont réfléchi un peu pour les négatifs, et puis voilà. Ensuite, nous avons fait la même chose en remplaçant les “…” par des lettres, et cela leur a semblé bizarre dans la syntaxe (“pourquoi faut écrire x= ???”), mais pas très compliqué.

Après cela, nous avons fait un peu de repérage. C’est pass comme une lettre à la poste.

Je les sentais vaguement déçus : “C’est simple…” m’a dit M avec un soupir tout adolescent… J’ai acquiescé : c’est naturel, en fait, et cela vient facilement quand on a compris les entiers positifs, mais c’est comme beaucoup de choses : on trouve ça simple quand on a compris. Mais quand même, je voulais les motiver et les rendre fiers d’eux. Alors j’ai proposé des additions de relatifs de signes contraires. Nous avons commencé par des calculs du type (+6)+(-9)=? (avec des résultats négatifs) et ensuite j’ai introduit des questions qui donnent des résultats positifs. Là, ça a frotté un peu : mes loulous avaient envie que tout soit négatif “parce que c’est ça qu’on apprend” pour l’un, “parce que c’est plus classe, le reste on sait déjà” pour un autre.

Une fois que tout a été posé, ils ont travaillé sur défi relatifs, avec seulement l’addition et des signes contraires d’entiers. Ils ont fait quelques battle, ce qui leur a beaucoup plu. Mais les exercices en solo ont eu du succès aussi : ils voulaient toujours faire mieux. Et ils ont été très forts.

Le lendemain, nous nous y sommes remis : nous avons travaillé sur les sommes de nombres relatifs de même signes. Les expressions comme (+7)+(+5) les ont bien fait rire : “Alors ça c’est bien un truc de prof, d’écrire des trucs super simples en faisant aussi compliqué ! On fait 7+5 pis voilà !” Nous avons alors abordé l’écriture simplifiée, et pourquoi c’est important aussi de comprendre l’écriture non simplifiée.

J’appréhendais un peu la suite : et (-8)+(-3), ça fait quoi ? Première réponse, immédiate : -5. Mais de lui-même, un élève a dit “Non non non, ça va pas. Ca peut pas être ça”. Il a réfléchi un moment, et m’a dit ceci :

Ah mais non. Ca fait -11. Parce qu’on va plus loin dans le moins. En fait faut les additionner dans la tête , et retenir que c’est dans les moins.

M.

Je suis restée un peu interdite devant une telle fluidité. J’ai demandé aux autres ce qu’ils en pensaient, et ils étaient placidement d’accord. J’ai donné des exemples sur ardoise aux trois zozos, impec. Ils ont enchaîné sur Défi relatifs en cochant aussi “signes identiques”, et ils ont cassé la baraque.

Cette histoire m’a fait réfléchir : d’une part, mes élèves pensent qu’ils vont pouvoir balayer tout le programme de cycle 4 ainsi. Or clairement pas : ils ne possèdent ni la multiplication, ni le décimal dans une version stable. Et ces deux points, didactiquement délicats, sont bloquants. Cela ne signifie pas que nous allons baisser les bras, mais cela va impacter notre progression.

D’autre part, ces trois élèves ont réussi à se faire une représentation du nombre relatif, vraiment en tant que nombre. Ils ne se sont pas laissés emballer par l’application de recettes. Je me demande à quoi cela tient. Comment puis-je utiliser cette expérience et mes observations pour aider d’autres élèves à se construire une représentation du nombre entier positif, je ne sais pas encore.

Enfin, tout ceci confirme une chose : le bonheur des maths est pour tout le monde !

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