Le handicap à l’école

Et voilà, je suis de retour au taf ! Aujourd’hui malheureusement la formation est en distanciel. C’est dommage car j’aurais aimé retrouver mes collègues stagiaires, vraiment top. Nous avons pas mal communiqué d’ailleurs pendant mon éviction covidée. Je les retrouverai lundi, après être passée au collège prendre les travaux de la semaine, réalisés par mes élèves, et en reposer de nouveau.

Aujourd’hui, j’ai donc les tâches de l’avant-distanciel à terminer (mais j’ai bien avancé hier soir), puis le distanciel, puis des devoirs à faire. Je voudrais minuter une présentation à venir, réfléchir au sommaire d’un livre à commencer à penser, commencer une nouvelle île dans Animal Crossing, préparer le choix du travail de la semaine prochaine en ULIS, peut-être entamer l’élaboration d’une autre formation à présenter en novembre. Et plus important que tout : prendre soin de mon mari et de deux de nos enfants, tout malades, que j’ai contaminés.

Ma formation d’aujourd’hui porte sur le cadre législatif et réglementaire qui entoure le handicap à l’école (et ailleurs, parfois). C’est ce sur quoi mes collègues ont déjà pas mal travaillé cette semaine. Le thème peut sembler rebutant, mais il est important : pour comprendre mes missions d’enseignante spécialisée, je dois savoir dans quel cadre officiel je m’inscris, et aussi l’histoire des politiques éducatives en matière de handicap. C’est instructif, et on voit bien comment une société évolue, ou tente d’évoluer : la loi est salutaire bien qu’extraordinairement tardive, et l’évolution réelle de mise en oeuvre toujours pas au rendez-vous. Il paraît que c’est comme ça, il faut du temps. C’est difficile à entendre pour moi : je sais la souffrance de tant de personnes, jeunes ou moins jeunes, concernées ou aidantes…

Avant 2005

Je choisis de balayer d’un coup tout ce qui est antérieur à 1957. Pourquoi 1957 ? Parce que le loi, en 1957, fait pour la première fois apparaître le terme de travailleurs handicapé et la protection qu’on commence à penser. En 1975, grâce au rapport de François Bloch-Lainé, “Etude du problème général de l’inadaptation des personnes handicapées”, remis en 1967, apparaît entre autres l’obligation éducative pour les enfants et adolescents handicapés, l’accès des personnes handicapées aux institutions ouvertes à l’ensemble de la population et le maintien des personnes handicapées chaque fois que possible dans un cadre ordinaire de travail et de vie. Des commissions départementales sont créées pour étudier la reconnaissance des handicaps.

En 1975, l’Assemblée générale des Nations unies adopte une déclaration des droits des personnes handicapées, et en 1981 c’est l’Assemblée européenne qui adopte la Charte des personnes handicapées.

Entre 1985 et 1990, on avance un peu dans les textes réglementaires côté social. Côté école, la loi d’orientation sur l’éducation affirme que l’intégration scolaire des jeunes handicapés est favorisée. En 1991, l’enseignement de la LSF est enfin autorisée pour les personnes sourdes. En 1991… C’est dire qu’on était loin dans l’inhumanité.

En 1993, un décret publie un barème qui instaure huit grandes catégories de “déficiences” : déficiences intellectuelles et difficultés du comportement, déficiences du psychisme, déficiences de l’audition, déficiences du langage et de la parole, déficiences de la vision, déficiences viscérales et générales, déficiences de l’appareil locomoteur, déficiences esthétiques, basé sur les travaux du britannique Philip Wood. Peu après, un rapport dénonce les conditions de prise en charge des personnes autistes en France. Se pose à cette époque la question de… la “stérilisation des handicapés”, qui n’est pas tranchée. J’en ai des frissons. C’est encore si récent. Comment est-ce possible ? Dire que nous nous considérons collectivement comme “civilisés”, toujours prêts à donner des leçons à nos ancêtres ou nos voisins !

En 1995, une circulaire souligne la nécessité. de favoriser l’intégration scolaire des jeunes handicapés, quelle que soit la nature de leur handicap. Les UPI sont fondées. Ce dispositif se fonde sur l’alternance de regroupements pédagogiques spécifiques et de périodes d’intégration dans des classes ordinaires.

En 1997, Jacques Chirac, alors président de la République, qualifie de “véritable honte pour notre pays l’incapacité dans laquelle nous sommes de faire face au problème de l’accessibilité des lieux publics et des moyens de transport par les handicapés”, et il dénonce “une sorte de refus culturel des techniciens”, ajoutant que la France est “très en retard par rapport à la plupart des grands pays du monde”. En 2002, Jacques Chirac toujours annonce qu’il souhaite privilégier trois “grands chantiers” : la lutte contre l’insécurité routière, l’insertion des handicapés et la lutte contre le cancer.

A l’école, pas grand chose ne bouge dans les faits, jusqu’ici. En 2003, la loi relative aux assistants d’éducation est promulguée : les assistants d’éducation rempliront des missions d’aide à l’accueil et à l’intégration scolaires des élèves handicapés et bénéficient d’une formation spécifique pour assurer leurs fonctions.

2005

En 2005, côté loi, c’est le renouveau : la loi du 11 février 2005 marque la refondation de la politique du handicap. Le truc, c’est que la loi ne fait pas tout. Loin de là. Mais cette loi apporte de réelles nouveautés. Pour la première fois, elle propose une définition du handicap :

Constitue un handicap, au sens de la présente loi, toute limitation d’activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d ’une altération substantielle, durable ou définitive, d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un polyhandicap ou d’un trouble de la santé invalidant.

La loi de 2005

On s’éloigne de la vision du “handicapé défectueux” pour s’intéresser à la vie de la personne. Le modèle proposé est beaucoup plus social. On sépare aussi beaucoup plus nettement le champ du handicap et celui de la grande difficulté scolaire. La loi voudrait offrir un parcours scolaire personnalisé, cohérent et continu.

Tout enfant, tout adolescent présentant un handicap ou un trouble invalidant de la santé est inscrit dans  l’école ou dans l’un des établissements le plus proche de son domicile, qui constitue son établissement de référence.

La loi de 2005

C’est aussi le moment où les Maisons Départementales des Personnes Handicapées (MDPH) sont instituées, et ESS (équipes de suivi de scolarisation) sont créées. Autre grande nouveauté : on pense la compensation et l’accessibilité.

Alors c’est vrai, depuis cette loi, la situation évolue positivement : le nombre d’élèves accueillis dans les écoles et les établissements scolaires a augmenté de 173% depuis 2006, la scolarisation des élèves en situation de handicap est plus longue, plus variée. Les élèves bénéficiant d’une aide humaine est multiplié par presque 6 et des moyens financiers et opérationnels sont engagés. Mais ce n’est pas suffisant. D’ailleurs les objectifs donnés par la loi ne sont pas tous réalisés, loin s’en faut.

Après 2005

Je passe directement en 2010, parce que c’est la création des ULIS.

Dans le second degré comme dans le premier, l’état de santé ou la situation de handicap de certains élèves peuvent générer une fatigabilité, une lenteur, des difficultés d’apprentissage ou des besoins pédagogiques spécifiques qui ne peuvent objectivement être prises en compte dans le cadre d’une classe ordinaire. Ces élèves ont besoin de modalités de scolarisation plus souples et plus diversifiées sur le plan pédagogique, qui leur sont proposées par les unités pédagogiques d’intégration (UPI) depuis 1995 au collège et 2001 au lycée. À compter du 1er septembre 2010, tous les dispositifs collectifs implantés en collège et en lycée pour la scolarisation d’élèves en situation de handicap ou de maladies invalidantes sont dénommés unités localisées pour l’inclusion scolaire (Ulis) et constituent une des modalités de mise en œuvre de l’accessibilité pédagogique pour ces élèves.

Le BO

Les ULIS sont destinées aux élèves présentant de troubles des fonctions cognitives ou mentales (TFC, dont les troubles spécifiques du langage écrit et de la parole), des troubles envahissants du développement (TED, dont l’autisme), des troubles des fonctions motrices (TFM, dont les troubles dyspraxiques), des troubles de la fonction auditive (TFA), des troubles de la fonction visuelle (TFV), des troubles multiples associés (TMA, pluri-handicap ou maladie invalidante). Les ULIS doivent constituer un dispositif collectif qui propose une organisation pédagogique adaptée à des besoins spécifiques et permet la mise en œuvre de projets personnalisés de scolarisation (PPS). Elles sont parties intégrantes de l’établissement scolaire dans lequel elles sont implantées :

Les élèves scolarisés au titre de l’Ulis sont des élèves à part entière de l’établissement et leur inscription se fait dans la division correspondant à leur projet personnalisé de scolarisation.

Le BO

Ce dernier point n’est pas encore passé dans les représentations collectives. L’accent est également porté sur le projet professionnel du jeune : on espère de la futilité. On espère toujours, d’ailleurs, aujourd’hui. Mais par observation et par expérience, ce n’est pas du tout, du tout le mot qui me vient à l’esprit.

Chaque Ulis est dotée d’un coordonnateur chargé de l’organisation du dispositif et de l’adaptation de l’enseignement. Ce doit être un enseignant titulaire du Capa-SH ou du 2CA-SH à l’époque, maintenant du CAPPEI.

Sa première mission est, dans le cadre horaire afférent à son statut, une mission d’enseignement face à élèves visant à proposer aux élèves handicapés, quand ils en ont besoin, les situations d’apprentissage que requiert leur handicap. Son expertise lui permet d’analyser l’impact que la situation de handicap a sur les processus d’apprentissage déployés par les élèves, aux fins de proposer l’enseignement le mieux adapté. Tous les élèves de l’Ulis reçoivent un enseignement adapté de la part du coordonnateur, pas nécessairement au même moment, que cet enseignement ait lieu en situation de regroupement ou dans la classe de référence. En outre, le coordonnateur organise le travail des élèves handicapés dont il a la responsabilité en fonction des indications portées par les PPS et en lien avec l’ESS. Enfin, s’il n’a pas prioritairement vocation à apporter un soutien professionnel aux enseignants non spécialisés, il constitue cependant pour l’établissement une personne ressource indispensable.

Le BO

Franchement, ce n’est pas une mission incroyablement palpitante, ça ???

Si. Palpitante. Je n’ai pas de meilleur mot. Et très importante dans la vie de ces enfants et leurs familles.

Mais on en a encore, du chemin, à faire, pour que toutes les étoiles brillent autant dans notre ciel…

Extra-Louise (et son extra-famille)

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