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La note de la DEPP qui pique

La note d’information n°19.08 de la DEPP (Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance) publiée en mars 2019 propose une analyse de l’évolution des performances en calcul des élèves de CM2 à trente ans d’intervalle, entre 1987 et 2017.

Le bilan est évidemment préoccupant. Je comprends mal qu’on puisse encore nier cette baisse. On peut chercher des biais, étudier la validité des questions évaluatives et des indicateurs, mais quelle que soit la façon dont on prend le problème, problème il y a.

Le document donne des indications sur la comparabilité des épreuves : “Des procédures et des épreuves identiques ne sont pas des conditions suffisantes pour garantir la comparabilité des résultats. Il convient également de distinguer ce qui est observé (la performance) de ce qui est visé (la compétence), des facteurs externes pouvant agir sur le niveau de performance indépendamment du niveau de compétence. Ainsi, il est possible que certains items s’avèrent plus difficiles ou plus faciles qu’il y a trente ans pour des raisons qui ne sont pas directement liées au niveau de compétences des élèves.” On nous explique ensuite quel modèle statistique a été utilisé, pour repérer et ne pas prendre en compte les biais. ce n’est pas détaillé, mais au moins il y a matière à approfondir, ce que je vais faire pour ma part.

Du point de vue de l’évolution des résultats, voilà :

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Mais ce n’est pas tout. On lit aussi que “le taux moyen de non-réponse se situait autour de 4 % en 1987 ; il est de plus de 14 % en 2017” sur les problèmes, autour “de 2 % en 1987 contre 15 % en 2017 pour les additions et de 6 % en 1987 contre 25 % en 2017 pour les soustractions.” C’est un problème bien identifié depuis longtemps chez nos petits Français : ils ne répondent pas s’ils ne sont pas sûrs. Leur rapport à l’erreur est inhibant, pour beaucoup. Cela devrait nous faire remettre en question le schéma classique de l’évaluation et du rapport à l’erreur. Ce n’est pas faute d’y travailler, dans les dispositifs de formation.

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D’autre part, l’origine sociale est encore plus déterminante qu’avant. Et “on observe, en 2017, un écart de 21 points entre les performances des élèves scolarisés hors éducation prioritaire (score moyen de 179 points) et ceux scolarisés en éducation prioritaire (score moyen de 158 points).” Là aussi, c’est une faiblesse particulière et insupportable de la France. Jean-Paul Delahaye attire l’attention sur cette injustice depuis bien longtemps, et il n’est pas le seul.

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Une autre infographie enfonce le clou :

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Le Monde en a fait un article :

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Dans cet article, Stanislas Dehaene est cité disant que les meilleurs élèves d’aujourd’hui ont le niveau des pires d’il y a trente ans, ce qui me paraît tout à fait absurde. La “valse des réformes” est désignée comme étant en cause, entre autres. Alice Ernoult, interrogée par le journal, dit ” Les coups de balancier ne nous laissent pas le temps d’apprivoiser les programmes. Les pratiques n’ont pas le temps de s’installer qu’elles sont déjà remplacées. Et les parents voient leur aîné apprendre comme ceci, leur cadet comme cela… On ne peut pas créer une culture du nombre partagée dans la société de cette façon-là”. C’est même un problème de fond qu’évoque là Alice, celui de la culture partagée. Toute notre société porte actuellement, au fil des semaines, cette question. La conclusion de l’article évoque l’importance de la formation des enseignants et la trop grande place prise par les jeux politiques. Un autre article évoque précisément cette question, en faisant référence aux laboratoires de maths, aux RMC :

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Alors je vais répéter ce que j’ai dit en formation pendant deux jours : ce n’est pas inéluctable. Travaillons ensemble, avec tous les chercheurs, tous les enseignants, tous les cadres pour qui les enfants sont au centre des préoccupations. Faisons fi des dogmes et des querelles de chapelle, et à l’attaque. Faisons entendre notre voix lorsque les choix politiques, justement, ne nous semblent pas les bons, et ne nous arrêtons pas là.  Ecoutons toutes les autres voix. Soyons force de proposition, tous, quels que soient nos avis, nos vécus, nos engagements, et surtout n’abandonnons pas.

C’est trop facile de se lamenter. Et nous nous devons d’être utiles.