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La neutralité dans les sciences est une illusion (Thomas Schauder)

Sur le Monde.fr, un article a été publié qui s’intitule :

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L’auteur , Thomas Schauder est professeur de philosophie. Il a enseigné en lycée et est actuellement en poste à l’Institut universitaire européen Rachi, à Troyes.

Selon Thomas Schauder, “une idéologie scientiste est à l’œuvre qui assimile la politique à une gestion de « stocks » et de « flux » humains, et l’individu à son seul mécanisme cérébral“. Son propos n’est pas d’enlever toute valeur aux sciences cognitives. Mais il appelle à la prudence, avec quelques exemples bien choisis. Son propos m’a intéressée : la dernière fois qu’en animation d’un stage j’ai fait référence aux neurosciences, pour étayer mon propos, j’ai aussitôt ajouté qu’il fallait toutefois rester prudent et garder à l’esprit qu’être enseignant c’est s’adresser à des personnes et non seulement à des cerveaux, et que les neurosciences évoluent très vite actuellement. Elles nous apportent beaucoup mais il fait toujours réfléchir les utilisations que nous en avons. Hé bien je me suis fait bien loxonner par deux enseignants, fans de neurosciences, qui m’ont asséné que ce que je disais était irresponsable, faux, et qu’en tant que formatrice je me devais de promouvoir au maximum les neurosciences. Après quoi ils ont grommelé à à peu près tout ce que je disais, jusqu’à ce que je leur demande de cesser.

Le sujet est donc un peu polémique chez les profs aussi.

Or Thomas Schauder écrit : ” quand Stanislas Dehaene déclare qu’il veut « agir pour l’éducation des jeunes, indépendamment de toute idéologie » (Le Monde, 15 janvier), il oublie une leçon fondamentale de l’épistémologie : la neutralité dans les sciences est une illusion. (…) Cette manière de s’en remettre à l’expertise pour cautionner tout et n’importe quoi est caractéristique du taylorisme.

Je crois que c’est pile cela qui a chiffonné (le mot est faible, au vu de leur attitude ensuite) mes collègues : pour eux, la science (pas seulement dans le sens conceptuel, mais même dans le sens oeuvre humaine) est neutre, fiable, sans doute rassurante. Mais non, pas comme ça, et heureusement que non. Les exemples sont légion d’ailleurs. Le « monde sans esprit », un monde déshumanisé, issu des « utopies » du XIXe siècle. Ni nouveau, ni désirable” que craint Thomas Schauder en conclusion de son article n’est pas crédible à mon avis : il n’y a qu’à regarder réagir mes deux collègues. Ils étaient très humains, dans leur réaction !