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Je doute, donc je suis.

Pour moi, c’est comme ça que ça marche. Le doute fait partie intégrante de moi. Il est un de mes moteurs, dans le sens où il me permet de me poser des questions. Mais attention, pas le doute sceptique (le principe du rejet systématique, c’est tellement facile ; souvent Capture d’écran 2018-03-04 à 17.09.31.pngassocié à une autre vulgaire facilité, l’ironie, pleine d’implicite et n’existant qu’en creux, berk, je déteste). Pas non plus le doute hyperbolique de Descartes, qui pousse un peu mémé dans les orties, quand même que je trouve excessif et au final inhibant.

Mon doute me permet, en particulier, de ne pas juger autrui, ni rapidement, ni définitivement : l’autre m’étant par définition étranger, j’accepte de ne pas le comprendre, de me tromper, qu’il reste éventuellement définitivement inaccessible à ma compréhension, en dépit de mes efforts. Je n’ai pas besoin de décider si cet être que je ne comprends pas a tort ou raison : il est juste différent de moi. Et puis bien sûr mon doute me permet aussi de pouvoir réfléchir sur moi-même, en intégrant ce que je perçois, les reflets qu’on me renvoie, et d’essayer en permanence de m’améliorer. Évidemment, c’est un peu fatigant pour mon entourage, à qui je fais part des incessantes questions et remises en cause qui m’assaillent en permanence. Mais au final, je ressors toujours enrichie après confrontation avec mes doutes.

Le doute, pour moi, n’est pas un système de pensée, ni une valeur ; mon doute est plutôt celui que décrivait Siri Hustvedt dans une émission que j’ai entendue récemment (mais j’ai oublié laquelle) : celui qui existe avant même de pouvoir être exprimé en tant que pensée.

Hé bien parfois, j’aimerais bien que le doute soit contagieux. Cela éviterait à certains de se comporter comme des barbares.

Et ça, j’en suis sûre.

 

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Confiance et fluctuation

L’échantillonnage, la prise de décision et l’estimation sont entrés dans les programmes du lycée en 2010. La France n’était pas très en avance, puisque je me souviens d’avoir passé ma certification DNL sur l’échantillonnage, pan des mathématiques enseigné de façon approfondie dans plusieurs Länder allemands.

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APMEP

Mais même si cela fait huit ans que ces questions sont entrées dans nos programmes, leur abord par une partie des enseignants est toujours problématique. Les “anciens” (dont je fais partie) ont souvent été réticents parce qu’ils n’ont pas appris tout cela eux-mêmes dans leur scolarité (ni dans le secondaire, ni parfois dans le supérieur : pour ma part, je n’ai suivi aucune UE de probabilités ou de statistiques, par exemple. Et pas parce que je les ai évitées : elles ne figuraient pas au programme sous des formes proches de ce qui est enseigné aujourd’hui). Mais ce qui interroge plus encore, c’est que les jeunes enseignants que je vois passer à l’ESPE rechignent toujours à traiter ces notions. Elles échouent en fin d’année, si on a le temps, ou rapidement traitées avant que les élèves ne disparaissent des classes, et elles sont déconsidérées : “c’est pas des maths”, “c’est n’importe quoi”, “ça ne sert à rien”… Peut-être est-ce lié au fait que ces futurs jeunes enseignants ont appris au contact de vieux enseignants, et qu’ainsi un modèle se reproduit. En tout cas il semble qu’il faille un temps considérable pour changer le regard.

Dans un document ressource sur ce thème, on lit, au paragraphe évaluation :

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Voilà qui pour certains enseignants ne doit pas rendre fou de joie à l’idée d’évaluer, et sans doute donc d’enseigner, cette partie du programme.

Que contiennent les programmes ?

  1. En seconde :

Dans le cadre de l’échantillonnage, on vise deux objectifs :

  • Chercher à faire réfléchir les élèves à la conception et la mise en œuvre d’une simulation
  • les sensibiliser à la fluctuation d’échantillonnage, à la notion d’intervalle de fluctuation et à l’utilisation qui peut en être faite.

Le premier point est dans la continuité du collège. Au cycle 4, on amène les élèves à “faire le lien entre fréquence et probabilité, en constatant matériellement le phénomène de stabilisation des fréquences ou en utilisant un tableur pour simuler une expérience aléatoire (à une ou à deux épreuves)”. Le concept de simulation interroge beaucoup les élèves d’ailleurs, qui se demandent comment on peut “faire comme si c’était du hasard”, question tout à fait fondée.

Le deuxième point demande d’introduire la notion d’échantillon (sur le modèle de Bernoulli), de justifier l’existence et de présenter l’intervalle de fluctuation d’une fréquence au seuil de 95%, pour ensuite exercer un regard critique sur telle ou telle situation, “notamment en faisant le lien entre la taille de l’échantillon et la largeur de l’intervalle de fluctuation”. Notons au passage que dans les aménagements 2016 du programme de la classe de seconde, on ne vérifie plus de conditions précises sur la taille des échantillons et la proportion : les échantillons doivent être “de taille suffisante” et les valeurs prises par les proportions “non extrêmes”.

Quelques précisions quant aux contenus :

  • Dans le langage courant, un échantillon est un sous-ensemble d’une population, obtenu par prélèvement aléatoire. Dans les programmes, un échantillon est constitué des résultats d’un nombre donné de répétitions indépendantes de la même expérience.
  • La fréquence des individus possédant le caractère étudié dans l’échantillon varie d’un échantillon à l’autre : c’est la fluctuation d’échantillonnage. Plus la taille de l’échantillon est grande, moindre est la fluctuation.
  • La proportion p dans la population est connue, et on se demande si la fréquence f observée dans un échantillon appartient à l’intervalle de fluctuation considéré. Si la fréquence f n’appartient pas à l’intervalle, on rejette, au risque d’erreur de 5 %, l’hypothèse que l’échantillon est compatible avec le modèle. Sinon, on n’a aucune raison de la rejeter, au vu des éléments dont on dispose.

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Notons que cette définition suppose implicitement que la fréquence suit une loi continue.

        2. En premières :

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Premières STI2S/STL

La loi binomiale entre en jeu. En faisant varier les paramètres n et p de la loi binomiale, on observe que le diagramme n’est pas toujours symétrique, et ni exactement centré sur p. Comme la loi binomiale est discrète, il n’est pas possible de déterminer précisément un intervalle au seuil de 95%. Du coup, on construit comme intervalle de fluctuation au seuil de 95 % l’intervalle (a ; b) où a est le plus grand entier tel que P(X < a) ≤ 0,025 et b est le plus petit entier tel que P(X > b) ≤ 0,025 (ce que l’on peut formuler de diverses manières équivalentes). En fait, a et b dépendent de n, et il serait plus pertinent d’indiquer n en indice de a et b.

L’intervalle (a ; b) est très proche de celui obtenu en seconde. Mais il a l’avantage d’être utilisable pour toutes les proportions et toutes les tailles d’échantillons, contrairement à l’intervalle de fluctuation vu en classe de seconde.

Cette fois, la proportion p dans la population est hypothétique. On se demande si la fréquence f observée dans un échantillon appartient à l’intervalle de fluctuation construit sur p. Si la fréquence f observée dans l’échantillon appartient à l’intervalle de fluctuation au seuil de 95 %, on accepte p comme proportion pour la population. Sinon, on rejette l’hypothèse selon laquelle cette proportion vaut p.

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On voit bien ici qu’entre la seconde et la première se joue un changement de perspective.

        3. En terminales :

Là, toutes les terminales générales et technologiques ne sont pas concernées de la même façon. L’intervalle de fluctuation utilisé est affiné. Je vous conseille la lecture de ce document (estimation_nouveau_programme2012), si vous voulez avoir une vue générale des principes.

Mais en terminales, on étudie aussi ce qu’on avait pu évoquer en seconde : l’intervalle de confiance. À partir d’une fréquence observée sur un échantillon, on détermine la proportion conservant la population. Comme environ 95% des fréquences observées sur des échantillons de taille n sont dans l’intervalle de fluctuation, 95% des intervalles associés centrés sur f contiennent p… Voilà l’intervalle de confiance :

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Les documents ressources insistent bien sur le fait que p n’a pas une “probabilité de 95% d’appartenir à l’intervalle de confiance”. Il lui appartient, ou pas, point.

Je vous avoue que pour ma part, l’intervalle de confiance me laisse perplexe. Je ne vois pas pourquoi il n’est exigible qu’en terminale, et je ne comprends pas en quoi c’est une nouveauté. Pour moi, il s’agit d’une autre façon de réfléchir sur l’intervalle de fluctuation, et même lui donner un nom me perturbe. Si quelqu’un qui me lit pense pouvoir m’éclairer, je suis volontiers preneuse, car je sens le doute titiller mes neurones sournoisement.

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Chez les collègues · Enseignement · Lire

Profs de maths épanouis

Capture d’écran 2018-03-04 à 12.05.13.pngDans NousVousIls, l’e-mag de l’éducation, a été publié le 2 mars un article intitulé “Prof de maths : « J’enseigne une matière dont les élèves perçoivent vite l’utilité ». Cinq enseignants décrivent leur rapport au métier, avec simplicité et justesse. Ca fait du bien,un article sur l’enseignement des maths qu’on lit en souriant. Et on s’y retrouve bien, car ces cinq collègues sont de vrais passionnés. En particulier, ils expriment l’importance de l’école, de l’enseignement de leur discipline, leur mission d’éducation, d’ouverture de l’individu. C’est souvent quelque chose qui fait sourire les gens, mais c’est manifestement quelque chose que nous partageons, dans notre profession. Dommage que les illustrations n’aient rien à voir avec l’enseignement des maths au secondaire : cela dessert un peu le propos, en accentuant l’aspect caricatural des écrits mathématiques.