A l'attaque ! · Chez les collègues · Formation · Je suis fan · Merci les copains · Question de grand · Tous ensemble !

La CAFFA des copains

L’année dernière, j’ai passé et obtenu la CAFFA. Je suis bien contente de l’avoir passé pour sa première session : c’est une bonne chose de faite. Comme je l’ai déjà écrit ici je crois, j’ai pas mal ronchonné, pour passer la CAFFA : mon emploi du temps est assez dense et devoir rationaliser autant les vacances et y bosser non-stop, pour décrocher une certification me donnant le droit de faire ce que je faisais déjà depuis de nombreuses années, ça m’a un peu contrariée. J’avais tort : passer la CAFFA m’a permis de réfléchir, d’apprendre, d’évoluer, d’échanger, d’avoir une occasion d’écrire, et puis comme ça je suis officiellement formatrice. Résultat des courses, l’année prochaine j’arrête la formation, car grâce au fait d’avoir passé cette certification j’ai envie d’aller plus loin. Mais si ensuite j’ai envie d’y revenir, je pourrai ! Et cela me permet aussi de rester à l’ESPE, puisque là aussi la CAFFA devient obligatoire. Bref c’était un bon plan, et je garde de mes heures de lecture puis d’écriture, en plein été, dans le jardin, un souvenir qui mêle anxiété (je ne savais pas du tout où j’allais) et plaisir (je ne savais pas du tout où j’allais et l’apprenais des tas de trucs).

Cette année, j’ai formé pendant une journée des candidats à la CAFFA, sur Éthique et déontologie. Ça m’a demandé pas mal de boulot, mais c’était (pour moi) un chouette moment. Et voilà que la CAFFA repointe le bout de son nez : j’accompagne dans leur mémoire quelques collègues, que je connais déjà et avec qui je suis très contente de pouvoir travailler.

Au départ, je me suis dit oulala, qu’est-ce que je peux bien leur apporter ? Je ne suis pas meilleure qu’eux, je suis même nettement moins compétente qu’eux dans les champs d’études qu’ils ont choisis, et puis même si je l’ai, la CAFFA, cela ne fait pas de moi une spécialiste de quoi que ce soit. Alors je le leur ai dit, et puis ensuite nous avons réfléchi ensemble à leur travail, puisque c’est pour ça qu’on était là. Et zou, c’est parti. Je découvre des domaines que j’ignorais, des ingénieries de formation dont je n’avais pas idée, des caractères remarquables, des qualités magnifiques… D’ailleurs, je rencontre le doute à tous les croisements, chez ses collègues. Je me suis même inscrite à un parcours Magistère intitulé “Pour une évaluation au service de l’élève”, qui va me permettre de mettre mes idées au clair sur la différence entre évaluation formatrice et évaluation formative, et aussi de suivre en entier un parcours magistère. Ce qui va me donner envie d’en suivre d’autres, à coup sûr…

Chez les collègues · Enseignement · Maths pour tous · Pour mes étudiants · Question de grand

Faut-il trucider le produit en croix ?

En voilà, une bonne question. Un petit spoil : oui, il faut trucider le produit en croix en période d’apprentissage. Tout simplement parce que le produit en croix est une méthode calculatoire, tout à fait efficace, mais à n’utiliser que lorsqu’on a compris la proportionnalité et intégré les automatismes, en étant capable de redonner du sens. Cela revient un peu à l’idée que pour comprendre le sens de la multiplication il faut savoir les tables par coeur ; on prendrait le problème à l’envers.

Le contenu de cet article s’appuie sur la réflexion de ma collègue Violaine Le Coz, dont le CM sur la proportionnalité, adressé aux étudiants aspirants professeurs des écoles, m’a considérablement fait avancer (comme tous les autres cours et fiches d’exercices qu’elle m’a transmis comme ça, paf, sans aucune hésitation, ce qui m’a permis de pouvoir enseigner dans une nouvelle formation en ayant quand même le temps de dormir la nuit).

Voyons quel parcours suit l’apprentissage de la proportionnalité tout au long de la scolarité de l’enfant.

Au cycle 1, la proportionnalité n’est évidemment pas un thème d’étude en tant que modèle, mais les enfants la rencontrent déjà. Dans la partie 5 des programmes, “explorer le monde”, on lit : ” Situer des événements vécus les uns par rapport aux autres et en les repérant dans la journée, la semaine, le mois ou une saison.” En apprenant à “utiliser un gabarit”, ils découvrent l’idée de référence sur laquelle on s’appuiera ensuite. “Construire des maquettes simples en fonction de plans”, “utiliser la loupe”, peuvent donner lieu à des formulations qui traduisent une situation de proportionnalité. Et la résolution de problèmes en général permet aussi de se familiariser avec des situations proportionnelles et non proportionnelles.

L’académie de Caen fait explicitement référence à la proportionnalité dans un document très bien fait. Par ailleurs, dès lors qu’on travaille le sens de la multiplication et de la division, on est en lien avec la proportionnalité.

L’académie de Nancy-Metz propose, de son côté, une activité explicitement tournée vers la proportionnalité, avec une recette de cuisine, dont l’objectif est de résoudre des problèmes multiplicatifs portant sur les quantités, en grande section.

Au cycle 2, le programme ne fait jamais apparaître le mot “proportionnalité”. Mais l’enfant continue de la rencontrer, et commence à modéliser : “réaliser que certains problèmes relèvent de situations additives, d’autres de situations multiplicatives, de partages ou de groupements”, “changer d’unités de numération de référence” en déterminant “combien de fois une grandeur à mesurer “contient” une grandeur de référence “, en particulier avec le travail sur la mesure du temps et la monnaie, “estimer à vue des rapports très simples de longueur”, “des objets de grandeurs égales sont représentés par des segments de longueurs égales ; une grandeur double est représentée par une longueur double”, d’où les notions de double et de moitié ; la proportionnalité est partout, mais il est encore trop tôt pour l’institutionnaliser : elle est en voie de modélisation “par morceaux”, en lien avec l’environnement de l’enfant.

On peut traiter par exemple ce type de questions :

  • Un sac de billes contient 8 billes. Combien de billes dans 5 sacs ?
  • Un sac de billes contient 8 billes. Combien de sacs pour contenir 40 billes ?
  • J’ai 7 sacs de billes. Ils contiennent tous le même nombre de billes. En tout, j’ai 42 billes. Combien de billes contient chaque sac ?

Ainsi, au cycle 2, sur les trois valeurs numériques données, l’une d’elles vaut toujours 1.

En tout cas, on voit dès les petites classes que le thème de la proportionnalité irrigue tous  les autres, et c’est bien pour cette raison que les programmes ne lui consacrent pas de partie dédiée, mais l’intègrent dans tous les domaines à enseigner.

Au cycle 3, introduit la proportionnait comme “notion nouvelle”. On établit des égalités entre des fractions simples”, on développe les compétences dans le champ multiplicatif, et la proportionnalité a dorénavant explicitement sa place, dans la partie Nombres et calculs :

Capture d’écran 2018-03-05 à 10.14.52.png

dans la partie Grandeurs et mesures :

Capture d’écran 2018-03-05 à 10.16.21.png

et dans la partie Espace et géométrie :

Capture d’écran 2018-03-05 à 10.17.35.png

Elle est aussi traitée de façon particulière dans les repères de progressivité :

Capture d’écran 2018-03-05 à 10.18.32.png

Ainsi, on débute avec les procédures de

linéarité additive :

Capture d_écran 2018-03-05 à 10.26.43

linéarité multiplicative :

Capture d_écran 2018-03-05 à 10.26.21

ce qui amène assez naturellement au passage à l’unité, qui n’est qu’un cas particulier de la linéarité : si on doit déterminer le prix de 11kg par exemple, le retour à l’unité est efficace, mais nécessite de maîtriser d’autres procédures calculatoires qu’auparavant. Et le coefficient de proportionnalité, abordé plutôt à partir de la sixième (ou à l’école lorsqu’il fait le lien entre deux grandeurs de même nature et qu’il est simple), fait son entrée. Attention toutefois : le coefficient de proportionnalité, hors cas cités ci-dessus, est exprimé dans une unité quotient, comme l’€/kg dans l’exemple illustrant la linéarité multiplicative. L’élève ne va pas le percevoir a priori, ce qui montre bien l’aspect délicat du sens à lui donner. C’est pourquoi il faut continuer à s’assurer de la compréhension des enfants de la proportionnalité et du sens des calculs associés.

Au cycle 4, on termine ce long apprentissage. Dans la partie “compétences travaillées », on lit dans le programme “Reconnaître des situations de proportionnalité et résoudre les problèmes correspondants”. On relie fractions, proportions et pourcentages, on étudie les échelles, les agrandissements-réductions ; les élèves “apprennent à choisir une méthode adaptée au problème de proportionnalité auquel ils sont confrontés”. Dans la partie Gestion et organisation de données, fonctions, on lit :

Capture d’écran 2018-03-05 à 13.54.20.png

Capture d_écran 2018-03-05 à 13.54.30

On fait le lien entre proportionnalité et la notion de fonction linéaire, entre proportionnalité et théorème de Thalès et homothétiques en classe de troisième.

Le produit en croix est ici cité comme procédure, mais précédé de “par exemple” : une fois les concepts bien intériorisés, on peut automatiser les calculs, et le produit en croix est une possibilité. Cette possibilité s’appuie directement sur l’égalité de fractions, et il faut donc être bien certain que ça aussi, c’est compris. Il ne faut pas non plus mettre tous ses oeufs dans le même panier : dans certains cas, le produit en croix n’est pas la méthode la plus efficace, et surtout elle est rarement la méthode la plus associée à une représentation mentale de la situation. Pour autant, c’est rapide et adapté tous les cas de figure. C’est comme l’usage des tableaux : représenter une situation de proportionnalité sous forme de tableau de façon systématique mène souvent les élèves à associer tout tableau à une situation de proportionnalité. Et là, à part nécessité d’un grand nombre de calculs répétitifs, le tableau n’a de toute façon pas grand intérêt. C’est juste une façon de présenter les données, qui demande du temps à réaliser souvent en classe, mais qui peut aussi être simplement mise en mots.

Pour conclure donc, le produit en croix, ce n’est pas mal. Non non non. Mais ne pas réfléchir, c’est mal.