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En 2023, les élèves de 6e ne comprennent pas les décimaux, alors qu’avant…

… avant, les élèves de 6e ne les comprenaient pas tous non plus, manifestement :

Source : Stéphane Chrétien

Attention : c’est en effet délicat et ne pas comprendre, en particulier avec des durées, c’est parfaitement compréhensible. Mais on pourrait cesser d’accabler la jeune génération avec autant de vigueur, peut-être.

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Et si on FAISAIT des maths au lieu de causer ???

Bon, bon, bon. Alors donc notre ministre a sorti un plans maths. Ooooh, chouette. Qu’y lit-on ?

En intro, je résume : ça va mal mais on a plein de médailles et de prix.

Afin non seulement de continuer à promouvoir l’excellence, mais aussi réconcilier tous les élèves avec les mathématiques et encourager l’égalité filles-garçons, Pap Ndiaye, ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse, présente la stratégie qui fera de 2023 “l’année de promotion des mathématiques à l’école”.

Source

Ok. Promouvons, si c’est en faisant des maths. Parce que juste demander aux collèges d’ouvrir un compte Facebook, cela me fatigue.

Ensuite, à l’école primaire, on poursuit le plan de formation actuel et on revalorise les CPC dès cette année. Ca, c’est très bien, de revaloriser les CPC, parce que vu leurs conditions salariales et la charge de travail, le fait même que des collègues soient CPC volontairement me stupéfie.

Au collège :

  • Encourager la création dans chaque collège d’un club de maths à partir de la rentrée 2023 pour cultiver le goût pour les mathématiques et le plaisir d’en faire ;
  • Mettre en place des groupes à effectifs réduits en classe de 6e en mathématiques, tant pour soutenir les élèves qui en auraient besoin que pour stimuler les élèves les plus avancés ;
  • Créer un cadre national de compétences en mathématiques (CNCM) sur le modèle du cadre européen de référence pour les langues (CECRL) pour certifier le niveau atteint par chaque élève en fin de 3e.
Source

Bon avec mes quatre clubs chaque année, je pense qu’on est tranquilles. Par contre si ça se trouve, je pourrais en être payée, avec plus que de l’estime, je veux dire. Parce que là tous mes midis en club, à raison d’1h par jour, cela doit me rapporter entre 0€ et 240€ par an. Vous aurez bien compris que je ne fais pas cela pour l’argent, mais pour mon plaisir et celui des élèves. Par contre un jour c’est l’absence de rémunération qui me fera arrêter, parce que parfois je fatigue de n’avoir jamais de pause.

En 6e, j’attends de voir les “groupes à effectifs réduits” : dans ma classe de 6e, j’ai 29 élèves dont 12 dans des situations extraordinaires dans leurs apprentissages. Je ne parle pas des dys, hein. Je parle des élèves qui ne savent pas lire, qui ont des handicaps physiques invalidants, qui sont malades, les hyperlaxes qui ne peuvent pas écrire, les élèves qui ne parlent pas du tout français, les élèves autistes, etc. Ma classe est formidable, adorable et super sympa. Mais aider tout le monde et chacun, c’est la folie furieuse. Alors oui, je veux bien des groupes en effectifs réduits, de façon plus fréquente qu’aujourd’hui : je vois mes élèves en demi-classe une heure par quinzaine, c’est peu, et ils sont en deux groupes chacun hétérogènes, ce qui ne permet pas une remédiation efficace.

Pour le cadre national, je suis perplexe : le DNB ne compte pas ? Parce que si vraiment on veut lui trouver une utilité, c’est de donner une idée du niveau atteint par rapport à une norme, non ? Ou alors on fait le truc du CNCM (on manquait d’acronyme, c’est vrai) et on vire le DNB. Là, je suis partante et même je ferai un article enthousiaste.

Au lycée, ça m’énerve. On nous ressort l’idée du module de réconciliation. Je n’en peux plus de cette idée de réconciliation, défaitiste à l’extrême, et dévalorisante pour les enseignants d’école et de collège. Point positif : le LP n’a pas été oublié. Et pour les maths en première et terminale, ” Rendre obligatoire en classe de 1ère générale l’heure et demie de mathématiques pour tous les élèves n’ayant pas choisi la spécialité mathématique, afin de solidifier la formation commune de tous les élèves en mathématiques”. Bon, attendons de savoir comment, qui, quoi. C’est un progrès par rapport à ce qui se passait, disons.

Autre point de vigilance : les inégalités filles-garçons (je préfèrerais les inégalités de genre, car beaucoup d’élèves ne se reconnaissent ni dans fille, ni dans garçon ; c’est plus complexe. Parler tout le temps de la dichotomie filles-garçons renforce des stéréotypes) et liées à la pauvreté. Là, on sent la phrase qui fait bien :

Pour lutter contre les stéréotypes de genre, l’objectif est d’atteindre d’ici 2027 la parité filles-garçons dans les spécialités mathématiques, physique-chimie et mathématiques expertes (les filles sont majoritaires en SVT), et tendre vers la parité pour les autres enseignements (Sciences de l’ingénieurs – NSI – numérique et sciences informatiques).

Source

Pourquoi est-ce que je râle encore ? Parce que dans cette phrase il n’y a rien et qu’on y confond cause et conséquence. Pour améliorer la situation, il faut FAIRE des maths. Pas de l’affichage, mais des MAAAAATHS ! Former, revaloriser, rendre compétent et compétente.

Bref, je me calme. C’est dimanche soir, on ne va pas pulvériser un beau weekend comme ça pour des bêtises.

Mais quand même : “Lutter plus précocement (dès l’école maternelle) contre les stéréotypes de genre qui découragent les filles”, ok, comment ? “Fixer des objectifs chiffrés d’orientation pour concentrer les efforts sur les secteurs scientifiques où les filles sont très minoritaires”, très bien, en faisant quoi ? “Décliner dans chaque académie dès les prochaines semaines cette stratégie de promotion et de revalorisation des mathématiques”, non, il faut FORMER !!! Et puis quoi, elles sont dévalorisées, en elles-mêmes, les mathématiques ??? Non : c’est le gouvernement qui porte cette dévalorisation.

J’aimerais écrire que j’y crois, qu’il y a de l’espoir, que les choses vont changer. J’aimerais présenter tout cela comme positif. D’ailleurs en réalité je ne demande qu’à être convaincue. Mais nous avons eu, j’ai ressenti tellement de déceptions, je me sens tellement abandonnée par le ministère, que je ne veux pas risquer d’être à nouveau dépitée. Le plan Villani-Torossian, tel qu’il était initialement, et tout son déploiement de base, porté par une véritable ambition et une énergie incroyable, était formidable et efficace. On voit ce qui en a été fait. Quant à la réforme du lycée… Alors si vraiment on veut améliorer les choses, on sait comment faire. Mais pour ça, il va falloir des moyens et des décisions. De vraies décisions. Et de vrais moyens.

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Le grand oral de Bruno

Hé bin c’est pas gagné. Merci Yvan, j’ai bien ri !

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Croissance non uniforme

Parmi les rengaines qui me pompent l’air, il y a celle de l’uniforme à l’école. Bon, déjà, la question de l’uniforme est un marronnier. Ici, j’ai lu une histoire de l’uniforme à l’école, qui permet de tordre le cou aux idées reçues, voire aux fantasmes :

En conclusion, on peut affirmer qu’en France ni les écoles paroissiales, ni les écoles communales laïques instituées par la République n’ont imposé d’uniforme aux écoliers, contrairement à certaines institutions privées élitistes dont on distingue les élèves à leur costume. Depuis la seconde moitié du XIXe siècle, l’école laïque, gratuite et obligatoire, s’adresse à tous. Jusqu’aux années 1960, le vêtement pèse dans le budget des familles, le coût d’un uniforme ne peut être envisagé.

“Distingue”, voilà un mot intéressant, écrit en italique par l’auteure de l’article, Viviane Le Houëdec, sur son blog Les petites mains.

Je ne crois pas un instant qu’il s’agisse d’une question d’égalité, quand un politique évoque le “retour” de l’uniforme à l’école. Certains sont très motivés par le sujet ; notre ministre, lui, semble séduit par l’idée mais prudent :

“Et si demain on décidait l’uniforme pour tous, tout de suite, je pense qu’il y aurait beaucoup d’effets contreproductifs”, poursuit le ministre. ”Ça aurait un coût, mais qu’on pourrait assumer (….). Je suis pour que ça soit basé sur le volontariat et que ça se développe parce que ça permet de lutter contre un certain nombre de phénomènes”, conclut-il.

source

D’abord, ce n’est pas un retour, puisque l’école publique n’en a jamais imposé en tant qu’institution.

Ensuite, l’uniforme à l’école, ce n’est ni égalitaire, ni équitable. Les conditions de vie des élèves sont très différentes, au sein d’un établissement, d’un établissement à l’autre, et l’entretien, le renouvellement des uniformes mènerait sans doute à des problèmes plus important qu’en son absence. Les élèves trouveraient sans doute d’ailleurs des tas de façons de désuniformiser leur uniforme.

L’idée de fond de l’uniforme, c’est bien celle de l’ordre, d’une part, tendance militaire pour les nostalgiques de je ne sais quoi, mais aussi, plus côté adjectif, de ce qui “ne change pas de forme”. Et là, on est complètement à côté des objectifs de l’école : l’école vise à faire grandir, à aider à changer de forme harmonieusement, en restant soi-même mais en développant sa culture, ses savoirs, ses compétences. Sans compter qu’entre l’entrée en sixième et la sortie de troisième, par exemple, la personne a littéralement changé de forme, vu qu’elle a gagné pas loin de 20% de sa taille de collégien en herbe. Mais même sur le plan psychologique, intellectuel, affectif, il n’y a pas uniformité, et c’est heureux ! C’est de nos différences que nous nous enrichissons les uns les autres, même si certaines différences s’expriment de façon perturbante pour le cours à certains moments. Enfin, pour revenir à l’idée d’ordre, une classe qui travaille, qui apprend, qui progresse, n’est souvent pas silencieuse. Pourtant, elle n’est pas non plus en désordre. Elle vit, elle échange, chacun de ses membres grandit à une vitesse non uniforme. Alors pourquoi faire comme si on se ressemblait tous ? A l’école, nous ne nous ressemblons pas, nous apprenons ensemble.

Alors en réalité que veut-on ? Un comportement de surface lisse, des rangs qui s’acheminent en silence vers leur classe, bien tous pareils ? Berk. Berk, berk, berk.

https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/uniforme/80565

Il y a des tas de façon d’aider les familles pauvres à vêtir dignement leurs enfants. L’uniforme n’en fait pas partie.

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Preuve et politique

Une preuve, en mathématiques (mais pas seulement), c’est un argument ou un ensemble structuré d’arguments qui permet de prouver. Pas de convaincre, mais de prouver. Encore que prouver convainc, en principe. Mais parfois on convainc sans prouver. Et parfois, on ne prouve pas et du coup on ne convainc pas. Bref.

Ce matin, j’ai croisé l’information qui suit, mais je n’ai pas voulu y croire. Finalement, j’ai entendu de mes propres oreilles monsieur Blanquer :

Au moment où je vous parle je pense qu’on a dépassé les 80%. On fait des enquêtes ministérielles. J’en profite pour répondre à tous ceux qui veulent toujours laisser croire qu’on dit des chiffres à la volée : il y a des enquêtes, et parfois ces enquêtes ont le statut de ne pas être communicables. C’est fait pour simplement éclairer la décision du gouvernement. Il y en a une qui m’a permis de dire les chiffres que j’ai donnés.

France info

Je n’en suis toujours pas revenue. C’est purement dingue.

Je propose une constellation du plan maths pour le gouvernement. Parce que moi, voyez-vous, je suis intimement convaincue du principe d’éducabilité. Et là, faut y aller, sans blague. Ca urge, même.

Moi, j’ai fait une enquête personnelle, et j’ai aussi un truc à dire. Après tout, y a pas d’raison, hein. Au moment où j’écris, je pense qu’on a dépassé 80% d’enseignants qui en ont ras la casquette d’être pris pour des quiches.

Sans mépris aucun pour les quiches, cela dit. C’est bon les quiches. Enfin les bonnes quiches.

Pfff, je fatigue…

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Pour comprendre, il faut une écoute consciente

Une collègue de mon collège a partagé avec moi cette vidéo, après une formation sur l’accueil des élèves allophones. Je la trouve très intéressante, dans le propos sur l’écoute consciente et pour la formulation même, “écoute consciente”. Ensuite, les exercices proposés seraient sans doute applicables ou adaptables avec des élèves, et cela me tente :

  • Trois minutes de silence par jour, pour apprendre à réentendre le silence ;
  • Un moment de décomposition des sources sonores (une sorte de dé-mixage) ;
  • Une écoute approfondie de sons du quotidien ;
  • Une réflexion sur la façon d’écouter selon le son, le contexte, etc. ;
  • S’appuyer sur le RASA pour écouter de façon active :

Comme je propose souvent des problèmes en vidéo ou en audio (des extraits d’émissions de radio) à mes élèves, je me dis que nous pourrions travailler l’analyse des sons. Qu’as-tu entendu ? Qu’as-tu retenu comme son ? Sur quoi fallait-il se concentrer pour capter le contenu mathématique? Je ne fais pas vraiment ça. Parfois je mets en garde, pour aider les élèves à se focaliser sur ce qui m’intéresse, parce que je sais qu’il y a un distracteur. Mais il doit y avoir des tas de distracteurs, en fait.

Julian Treasure prône d’enseigner l’écoute à l’école. C’est encore autre chose que de vouloir enseigner la concentration, je trouve. Il voudrait ainsi contribuer à faire penser, permettre de réfléchir et pacifier, consciemment.

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Ce soir, activité : calculer le périmètre de 1 km autour de chez vous. Prenez votre cahier, s’il vous plaît.

Alors voilà, sur le site Service public du gouvernement :

Je me dis super, voilà qui est éducatif ! Rhalala, quelle cruelle déception m’attendait :

Le site Géoportail propose un outil vous permettant de visualiser aisément ce périmètre autorisé à partir de votre adresse et connaître ainsi le périmètre précis que vous pouvez parcourir à condition de vous munir d’une attestation de déplacement

N’importe quoi. D’abord, un périmètre, c’est une longueur (*). Par conséquent, ça ne se voit pas. Ca se calcule. D’ailleurs, pendant qu’on y est, attention, le périmètre n’est pas le contour. Le périmètre est la longueur du contour d’une figure. C’est très différent, comme nature. L’un est nombre, exprimé dans une unité définie a priori, et l’autre est ensemble de points.

Bon alors du coup, comme le site gouvernemental ne répond pas du tout à la question qu’il pose lui-même, je fais ma B.A. et j’aide : pour calculer le périmètre du km autour de votre domicile, il faut commencer par comprendre pourquoi la figure obtenue est un cercle. Pas si simple : cela fait référence à la définition du cercle comme ensemble de points équidistants d’un point fixe (son centre), et non à l’image mentale du rond (berk) qui n’est pas mathématique.

Ensuite, en principe il vous faut avoir recours à cette formule :

Périmètre du cercle = π x diamètre du cercle

Et comme le rayon de notre cercle mesure 1km, le diamètre mesure 2km. Le périmètre de votre cercle est donc égal à exactement 2π km, soit environ 6 km, ou environ 63 hm, ou environ 628 dam, ou environ aussi 6 283 185 mm.

, il y a une réactivation sur π et le périmètre du cercle, qui date du confinement de l’année dernière, si vous brûlez d’envie d’en savoir plus sur le fabuleux nombre π.

Bon, mais évidemment c’est en supposant que la projection au sol de votre cercle imaginaire est plan. Ce qui est sans doute faux. Et donc le première de votre zone est supérieur à 2π km. Et je n’ai aucune idée de combien mesure son périmètre. Ca dépend vraiment où vous habitez, en fait.

Tout ça pour ça, oui.

(*) Ouiiiiiii je sais, le périmètre c’est aussi, en langage non mathématique, la “zone de terrain définie, déterminée, réservée à quelque chose, à quelqu’un” (Larousse). Avouez c’est un bon exemple de faux-ami, pour qui apprend les maths : il y a de quoi appuyer la confusion périmètre-aire. Et Geoportail représente un joli cercle tout en parlant de périmètre et en faisant référence à une zone. En voilà, de l’implicite. (**) Comme avec rayon et diamètre (un rayon, c’est un segment qui relie le centre du cercle à un point du cercle, mais cela désigne aussi la longueur de ce segment, et là on peut parler DU rayon au singulier, du coup), et là, pourtant, dans le champ des mathématiques. Comme quoi, le langage n’est pas toujours univoque en mathématiques…

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Mon zèle n’a besoin que de votre silence.

Dans le Journal du Dimanche, Jean-Michel Blanquer donne une interview.

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J’ai voulu par des mers en être séparée

En mai, l’objectif est que 100 % des élèves soient en lien avec l’école! Ceux qui ne seront pas en classe continueront l’enseignement à distance. Et nous mettrons tout en œuvre pour ramener les 4 % de  décrocheurs.

4% ? Mince, mon établissement, qui est plutôt favorisé, est au-dessus. C’est fou, ça. Parce que 4%, c’est 1 élève, dans une classe de 25. Ça me semble peu, à l’échelle nationale, 1 décrocheur par classe de 25 élèves.

Il faut que je cherche ce que signifie décrocheur, dans cette situation.

Réparez promptement votre force abattue

 Le but n’est pas de boucler les programmes coûte que coûte; nous devons raisonner à cheval sur l’année prochaine.

Ca tombe bien, et on peut enlever le “coûte que coûte” : boucler un programme, c’est avoir transmis connaissances et compétences, pas juste évoqué un titre ou noté un nom de chapitre. Et là, bon bin clairement c’est fichu. Et en fait, ce n’est pas très grave, si on construit bien la suite. Nous enseignons plus pour les démarches que pour des contenus purs. Maintenant, s’il s’agit de traiter l’année prochaine une programme et un tiers, ça va être tendu. Surtout si les conditions de distanciation perdurent, car cela va influer sur les volumes horaires d’enseignements.

Le mot-clé, c’est « personnalisation ».

Dans un sens, oui. Mais n’oublions pas que le but est aussi de reconstruire le collectif.

Madame, pardonnez. J’avoue, en rougissant,

Que j’accusais à tort un discours innocent.

«Près de 50%» des enseignants retourneront lundi travailler dans les écoles, ce qui permet, selon Jean-Michel Blanquer, «de bien accueillir les élèves qui reviennent». Les professeurs qui ne seront pas en classe «s’occuperont de l’enseignement à distance pour les élèves à la maison». «Sous différentes modalités, tout le monde sera donc au travail», assure le ministre.

Je suis sans doute sur la défensive, mais je trouve que ça donne une impression de “ne vous en faites pas, ils vont bosser, les enseignants, je vais vous les mettre au boulot, moi”. Mais c’est peut-être l’article, qui, en mettant en exergue la dernière phrase, parfaitement inutile et vide d’informations nouvelles, qui donne cette impression. Pour rappel, nous n’avons jamais cessé de travailler, et notre charge s’est alourdie.

Mais admettons qu’à force de nous faire mépriser si souvent, je deviens parano…

Tout m’afflige et me nuit et conspire à me nuire.

Comment encourager collégiens et lycéens à étudier jusqu’au 4 juillet ?

Les conseils de classe doivent avoir lieu le plus tard possible. À partir du 11 mai, les professeurs peuvent de nouveau évaluer, même en cas d’enseignement à distance.

Magnifique. Donner envie d’apprendre et de travailler à nos jeunes, c’est donc les menacer avec des conseils de classe et des évaluations. C’est bien connu, les notes sont de bonnes carottes. Et si personnalisation il y a, c’est bien qu’on nous demande, à juste titre, de tenir compte des cas particuliers. Alors comment évaluer des élèves qui n’ont pas vécu les mêmes conditions ? Ceux qui n’ont pas pu suivre par manque d’équipement ou de connexion, ceux qui n’ont pas à la maison des personnes disponibles et aptes à les aider scolairement, on les évalue sur la base de quoi ?

Je ne trouve qu’en vous je ne sais quelle grâce

Qui me charme toujours et jamais ne me lasse

J’aurais été plus populaire en supprimant l’oral de français, mais les élèves me remercieront dans dix ans, en se souvenant de leur lecture de Phèdre pendant le confinement.

Non, pardon, hein, mais là les mots me manquent.

Monsieur Blanquer envisage-t-il le stress de ces élèves, qui n’ont pas pu étudier l’intégralité de leur liste de textes et d’ouvrages, qui n’ont pas pu se préparer au moment où cela devenait une perspective réelle ? Quant à l’exemple de Phèdre, cela dit tout.

Et je n’ai rien contre Phèdre en particulier, qui est même tout  fait magnifique. Mais je ne suis pas sûre que ce soit ce dont les lycéens de première se souviendront quand ils penseront au confinement.

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Enseigner ou évaluer ?

Dans un article du 6 novembre, le Café Pédagogique pose la question des progrès ou non au regard des évaluations nationales de début d’année. Deux points de vue s’opposent : Jean-Michel Blanquer affirme des progrès, Roland Goigoux (entre autre) n’est pas de cet avis.

 “Les évaluations réalisées en cette rentrée – les deuxièmes complètes après celles de 2018 – montrent des progrès significatifs sur les points clés : la fluidité de lecture et la capacité de calcul. Nous vivons un moment historique pour l’école : d’une part, la maîtrise des savoirs fondamentaux est en hausse – autrement dit : le niveau des élèves remonte – et d’autre part, l’amélioration est plus forte pour ceux qui viennent des territoires les plus défavorisés. Ça répond à mes deux objectifs principaux : hausser le niveau général, assurer plus de justice sociale”, affirme JM BLanquer dans le Journal du Dimanche du 3 novembre.

L’étude de la DEPP, sur le site du ministère, est plus prudente et plus factuelle. Je m’intéresse ici aux mathématiques.

On y trouve l’avis des enseignants quant aux questions posées. Par exemple, la question sur la ligne numérique est jugée pertinente par peu d’enseignants, en CP comme en CE1. J’espère que le ministère va s’emparer de la question, car il y a là matière à réflexion pour les évaluations à venir, et quant au fond, du point de vue didactique :

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En revanche, les enseignants sont beaucoup plus satisfaits des temps alloués pour les passations. On pourrait en discuter pour les sixièmes, tiens, aussi. J’aurais des choses à dire, moi.

Sur l’utilité des évaluations pour la construction des groupes de besoin, le paragraphe utile des mots positifs (plus d’un tiers, stable), mais c’est assez dramatique : ces Capture d’écran 2019-11-10 à 12.27.02.pngévaluations semblent vues comme une volonté institutionnelle de mesurer les performances, déconnectées de la classe, et pas comme un outil pédagogique, pour les enseignants ayant répondu au questionnaire.

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Regardons les “performances” en maths cette année en CP et en CE1 :

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Pourquoi cette controverse ? D’abord parce qu’en français il est des domaines qui régressent, comme la compréhension de mots et la reconnaissance de lettres, que moins d’élèves réussissent. Mais aussi parce qu’en fait l’évolution est très modeste :

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Globalement, il y a du mieux, en mathématiques. Ce mieux est modeste, pas dans toutes les compétences, pas pour toutes les catégories de niveaux, mais on peut se dire que c’est déjà ça : l’évolution est positive, et elle concerne tout de même un effectif important d’élèves. D’un autre côté, tout est une question de regard : on peut se concentrer sur les régressions ou les absences d’évolutions. Mais sur un temps si court, qu’attendait-on ?

Et pour les publics en zone d’éducation prioritaire ?

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Le Café pédagogique écrit :

Mais si les écarts se réduisent faiblement entre éducation prioritaire (EP) et non EP, l’écart entre Rep et Rep+ augmente. Le document Depp ne s’étend pas sur cette réalité. Mais les données de la Depp le donnent à voir.

En effet, certains résultats sont explicites :

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Pour Roland Goigoux :

“Quand le ministre dit que le niveau monte, il parle du niveau moyen. Mais quand on regarde entre Rep et Rep+ c’est le fiasco”, nous a dit Roland Goigoux, un spécialiste reconnu des apprentissages qui avait déjà analysé les résultats de 2018. “En Rep+ les performances sont toujours aussi mauvaises. S’il y a une réduction entre éducation prioritaire et hors éducation prioritaire, elle est légère. L’effet des dédoublements est positif mais faible. Les dédoublements ne fonctionnent pas”.

Que d’agitation médiatique, de colères, d’argent dépensé, aussi, autour de ces mesures de performances… Au final, qui aident-elles ? Les élèves ? Les enseignants ? Au vu de leurs dires, elles semblent surtout ne rien changer, ne rien apporter dans les classes. Et comme toujours, on cherche à montrer des résultats immédiats, éclatants. Mais on est dans la vraie vie. Une vraie vie dans laquelle les écoliers apprennent, les enseignants enseignent, les formateurs forment. Mais nous voulons mieux, et nous sommes tous d’accord sur ce point : plus d’expertise, plus d’égalité. De nouveaux dispositifs de formation se déploient et auront, sans doute, des effets, pour peu qu’il soient pérennisés de façon cohérente. Tout le monde de serait ravi de constater des progrès qui promettent des jours meilleurs pour les enfants à l’école, et dans leur vie future d’adultes et de citoyens.

Alors peut-être le ministère pourrait-il nous laisser du temps ? Du temps, et du calme. L’urgence, nous l’avons comprise. La motivation pour changer les choses, nous l’avons.  Le courage et la capacité de travail aussi. Mais pour bien travailler, il faut nous laisser nous concentrer.

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Histoire de règle, mais pas pour mesurer des longueurs

Ce matin, j’ai lu sur différents médias des réactions à la dernière publicité de Nana (accessible à partir de cet article par exemple), pour des serviettes hygiéniques. Je suis allée la voir, du coup. Comme je n’ai pas la télé, je ne l’avais pas croisée : elle date déjà d’au moins deux semaines.

J’avoue être tout à fait stupéfaite. On voit des représentations de pénis presque n’importe où, sur les tables des classes, dans les toilettes publiques, gravées sur les vitres des métros, mais imager le sexe féminin, oh non, surtout pas. Je ne vois pas du tout ce qu’il y a de “dégradant pour la femme” dans ce spot. En tout cas, je ne suis pas sentie dégradée du tout, moi. J’ai souri et puis j’ai continué mon chemin. Au moins la publicité est gaie, et a le mérite d’aborder la menstruation simplement. Or, tout montre que notre société a encore bien du mal avec les règles.

Parmi les réactions, j’ai lu par exemple :

J’ai aussi visionné des interventions sur des blogs, de femmes, d’ailleurs, qui s’insurgent. Il semble que deux ressentis un peu différents coexistent : ceux qui s’offusquent de la représentation du sexe féminin, et ceux qui sont choqués par l’image sur laquelle on voit du sang sur un serviette.

Il me semble que la première catégorie est bien excessive. On est là dans l’image, pas dans l’explicite, et quand j’entends comparer cette publicité à un film porno, je ne comprends pas. Cette publicité ne parle pas de sexualité, mais de menstruation. Et la menstruation se fait dans cette zone-là, ça, c’est un fait. Dans le genre, on pourrait proposer une vidéo d’accouchement, peut-être ces personnes relativiseraient-elles l’aspect “choquant” de la publicité.

Ensuite, il y a ceux pour qui l’image (fugitive) d’un peu de sang sur une serviette choque. Là encore, c’est juste comme ça que cela se passe, biologiquement. C’est déjà pénible d’avoir ses règles tous les mois, si en plus il faut se terrer pour que ça ne sa sache pas et surtout, continuer à faire son active-woman en skinny blanc, hé bien c’est bien dommage. Nos règles ne sont pas non plus un sujet de conversation, mais en faire un tabou, c’est idiot : la semaine dernière, une élève était manifestement en difficulté dans ma classe. Lorsque je suis allée la voir, elle m’a dit qu’elle avait besoin d’aller aux toilettes, mais qu’elle ne voulait pas demander parce que ce n’était pas pour aller faire pipi, excusez-moi-madame-de-vous-parler-de-ça-mais-vous-voyez-ce-que-je-veux-dire-?, et qu’elle avait peur que cela se sache. Elle était au bord des larmes. C’est que passer de non menstruel à menstruel, ce n’est pas si simple, par rapport à sa propre image de soi. Sans “devenir une femme”, on bouge, forcément. La semaine d’avant, une autre élève est venue me voir parce qu’elle ne savait pas si elle avait le droit d’aller voir l’infirmière, pour avoir un anti-douleur car elle avait mal au ventre : “on m’a dit qu’il faut avoir mal et rien prendre”. En 2019, ce type de parole circule encore ? On paie toujours la pomme, dans l’imaginaire collectif ?

Alors ce serait bien que la société prenne tout ça de façon naturelle, sans excès, et permette à chacun de vivre tranquillement sans créer de faux problèmes.

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Repérage

La semaine dernière, j’annonçais en stage ne pas savoir du tout si nous allions avoir des repères en cycle 4, et que je n’avais eu vent de rien. La plupart des collègues en face de moi espéraient, et moi j’espérais qu’ils ne sortent pas. Et là, paf, ils sont sortis. Côté intuition, je suis au top…

Pour ma part, je préférais ne pas avoir de repères, pouvoir m’adapter, d’autant que les programmes sont déjà explicites. Pouvoir respecter les rythmes d’apprentissage des enfants, pouvoir repousser à plus tard pour attendre le bon moment, pouvoir accélérer pour ceux qui sont prêts, bref différencier en toute liberté, c’est efficace. En même temps, ces repères ne changent pas grand-chose à mes pratiques : si je les regarde en quatrième, classe que j’avais cette année, j’ai fait des choses en plus (les puissances de dix d’exposants négatifs, la double distributivité, les probabilités, les rotations, l’étendue, les histogrammes), et il en manque quelques-unes (la médiane, le théorème de Thalès). De toute façon, disposer de repères n’oblige pas à s’en contenter : ils contiennent les évaluables au sens institutionnel, mais ce ne sont pas des crans d’arrêt. Ce sont des repères. manifestement leur parution ne rime pas avec révolution, dans mon cas.

J’y ai lu des choses que j’aime bien, cela dit :

J’aime bien que l’on considère les formules sur les puissances comme naturelle. J’aime aussi qu’on puisse dire le mot “vecteur”. Et j’adore les calculs qui impliquent ainsi les unités.

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La démocratie, c’est le parcours du combattant

J’avais besoin d’imprimer mon bulletin de vote, ce matin, pour la liste trucmuche.

Je lance l’impression, et là paf, plus d’encre. J’ai un quart de bulletin de vote. Ou 0,25, ou vingt-cinq centièmes, ou 25%, comme vous voulez.

Je cherche quels magasins sont ouverts le dimanche qui vendraient des cartouches, je n’en trouve pas, normal.

Nous appelons beau-papa : il a une imprimante aussi !

Pas de chance, aujourd’hui, son imprimante refuse d’imprimer.

Il me dit qu’il va aller chez de la famille, à l’autre bout de l’agglo, l’imprimer là-bas.

Une fois sur place, son mail décide de ne plus fonctionner. Il ne peut plus récupérer le fichier.

Je renvoie mon fichier sur une adresse mail du propriétaire de l’imprimante.

Je vais chercher là-bas mon bulletin de vote. Yes !

Dans la foulée, je me rends à mon bureau de vote.

Une fois là-bas, la personne qui m’accueille ne me trouve sur aucune liste. Il cherche.

Il me dit que j’ai dû être radiée.

Il cherche encore. Il me trouve et me dit que je me suis trompée de bureau de vote.

Je suis perplexe, alors gentiment il cherche à nouveau. Finalement je ne suis pas radiée et je suis au bon endroit.

Mais je vais être radiée car j’ai déménagé.

Je vais voter.

Je ne prends pas de bulletin car j’ai le mien. On m’arrête avant l’isoloir : je dois prendre un bulletin de chaque. Une discussion s’ensuit : si je ne prends aucun bulletin, est-ce embêtant ?

Je vote (ouf !).

En quittant le bureau, un des assesseurs dit à un autre : “Hé, Thierry, j’en ai remis des bulletins de vote de la liste trucmuche, il n’y en avait plus.”

Ils avaient imprimé le bulletin de vote de la liste pour laquelle je voulais voter, en fait.

Pfiou, je vais aller corriger des copies, ça va me reposer !

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Elections européennes et géométrie dans l’espace